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SAMEDI 09 OCTOBRE 2021

SAMEDI 9 OCTOBRE 2021 - Chabbat NOA’H

Noa’h

Le repos du juste

La Paracha de cette semaine, Noa’h (Genèse 6 :9 – 11 :32) raconte l’histoire bien connue du Déluge, le « Maboul. » Lorsque l’humanité s’est pervertie dans ses mœurs et surtout par le vol, D_ieu a décidé de la détruire. Seul Noé « homme intègre et entier » (6 :9), ses trois fils et leurs épouses ont mérité d’être épargnés, en se réfugiant dans une arche, sorte de bateau, dont la construction avait été demandée par D_ieu.  Avec eux, les animaux qui ont mérité d’être sauvés, ont également trouvé place à bord de l’arche. C’est que les hommes s’étaient tellement corrompus que les animaux aussi en sont venus à les imiter « en s’accouplant avec d’autres espèces » (Rachi sur 6 :12). Le Déluge va se déclarer en l’an 1656 suivant le texte biblique (-2104 EC) et va durer un an et dix jours. La terre entière va être inondée, les pluies torrentielles ayant fait émerger les eaux des profondeurs.  

J’ouvre ici un aparté. Certains n’ont pas manqué de faire le lien entre les inondations qui ont eu lieu cette semaine dans le sud de la France et le contenu de la Paracha. Je me permets de dire sur ces sortes de réaction à l’emporte-pièce : méfions-nous des conclusions hâtives.  La facilité que nous avons à les exprimer doit retentir comme un signal d’alarme ! C’est que les faits ne se créent pas sur la scène mais dans les coulisses. Alors fuyons les évidences et cultivons le contre-pied. Revenons au sujet.

La Paracha contient encore un fait historique qui a mérité par nos Sages d’être comparé au Déluge. Il s’agit de la Tour de Babel (11 :1 – 11 :9) qui a eu lieu : en -1764 EC. La Torah n’est pas volubile sur les détails de cette histoire, ce qui a dû permettre, ajouté à l’équivoque de certains versets, une certaine liberté d’interprétation, assez surprenante, de la part des commentateurs. 

Les hommes décident donc de « construire une ville et une tour dont le sommet atteindrait le ciel afin de se faire un nom, de peur d’être éparpillés sur la surface de la terre » (11 :4). Voyant que « le peuple était un et parlant une seule langue, et que rien n’empêcherait - de faire aboutir - tout ce qu’ils entreprendraient » (11 :6), « D_ieu est descendu voir » (11 :5), a embrouillé leur langue et a dispersé les hommes à la surface de la terre, ce qui a mis fin au projet. Sans communication, nul projet ne peut aboutir. De ce mélange, « balal » en hébreu, sont apparus les langues ; et l’endroit, Babel (actuelle Iraq) a été nommé par rapport à ce mot. C’est ainsi que la rébellion a été sapée. Mais l’humanité n’a pas été détruite. 

Pourtant nos Maitres nous enseignent que « leur intention était idolâtre » (Sanhédrin 109), qu’ils désiraient « porter atteinte à l’Etre » en disant : « C’est nous ou Lui » « qu’ils voulaient Lui faire la guerre. » Ce « nom qu’ils désiraient se faire » dont parle l’Ecriture (11 :4) c’était donc, selon Na’hmanide, un nom divin. Dans le même esprit, pour Sforno, ils désiraient y diviniser Nimrod afin qu’il puisse y avoir un œil sur l’humanité. 

Comment comprendre alors, demande le Talmud (suscité) que la faute du Déluge soit châtiée par la destruction totale, tandis que celle, bien plus grave, de la Tour de Babel qui prônait l’idolâtrie dans les plus hautes sphères, n’eut rien d’autre à subir que la dislocation de sa communication ?

 

La réponse tient en ces mots : « Le peuple était un et parlait une seule langue. » Parce que vivant en paix les uns avec les autres, parce que régnait chez eux la bonne intelligence, même si cela leur a permis de fomenter un projet aussi terrible qu’impossible, le châtiment leur a été épargné au nom de cette union. C’est d’ailleurs pour cela que l’Eternel a dû intervenir et descendre afin d’empêcher que cet « incubateur » rende possible l’émergence de « start-ups » renégates. Ce qui se serait passé et par la force de l’union. 

A l’inverse de cette symbiose, la faute moins existentielle du vol, a été fatale à l’humanité à cause de cette désunion. Lorsque les individus sont individualistes et égoïstes au point de s’approprier le bien d’autrui, c’est-à-dire lorsqu’ils admettent que les possessions peuvent se confondre et non les âmes, il n’est plus possible de réparer une telle société, convaincue de la moralité de son système, en lui montrant qu’il ne l’est pas. Il faut nécessairement rebattre les cartes, c’est-à-dire repartir de zéro. D’où le Déluge. Seul Noa’h capable de vivre en paix, à savoir en capacité d’allouer à chaque créature la place qui lui est propre à l’intérieur de cet espace confiné qu’est l’arche, ce juste est en mesure de se passer de la leçon du déluge. 

Je me permets cette réflexion dans la continuité de l’explication : serait-ce cela la raison pour laquelle la punition de toutes ces individualités fût la noyade ? Manière de dire : s’ils n’ont pas voulu l’entraide et la concorde dans la vie, c’est contraint et forcé que, dans cet élément qu’est la mer, ils seront confondus. Ici ils se retrouvent unis de cette unité terrible. 

Alors prions pour la paix. Mais surtout agissons pour la paix. Car le changement que nous voulons pour le monde, ce n’est pas au monde de le faire. C’est à nous.

Chabbat Chalom

Binyamin Afriat

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